Cirque

Phia Ménard, la dompteuse des éléments

- temps de lecture approximatif de 3 minutes 3 min - Modifié le 07/09/2019 par Hélèna D.

Phia Ménard est artiste associée au Théâtre Nouvelle Génération depuis janvier 2016. Nous la retrouvons cette saison avec Les Os Noirs, sa nouvelle pièce du vent ! Quelques pistes pour comprendre les problématiques de cette artiste et notamment pourquoi et comment elle joue avec le vent dans ses créations actuelles.

Les os noirs / Phia Ménard / © Jean-Luc Beaujault
Les os noirs / Phia Ménard / © Jean-Luc Beaujault

La jongleuse des éléments

Formée à la danse contemporaine, au mime et au jeu d’acteur, c’est auprès de Jérôme Thomas que Phia Ménard développe sa technique de jonglerie. Elle fonde la Cie Non Nova en 1998. A partir de 2008, elle travaille avec la glace, l’eau, la vapeur et le vent.

“C’est important d’utiliser des éléments connus et reconnaissables par quiconque, parce que chacun à ses expériences de la matière, que ce soit une affinité ou un rejet. Pour moi, c’est l’outil de l’imaginaire. ” P.M.

Elle signe depuis plus de vingt ans des créations spectaculaires, toujours en prise avec la matière. Chacune de ces pièces est singulière et inspirée tout autant de la danse que des arts du cirque ou de la performance.

Elle réalise des spectacles muets, ou presque. S’il y a bien un texte au départ, il s’efface dans le processus de création. L’artiste parle d’évacuer l’intellect et d’échapper au langage saturé de mots.

Le vent comme matériau

Après avoir longtemps travaillé avec la glace, Phia Ménard travaille actuellement avec le vent comme matière de transformation.

“Le vent est une matière, dit-elle, qui érode, qui change, instable, impalpable, invisible, donc une matière très troublante, ce qui m’intéresse.” P.M.

L’Après-midi d’un fœhn et Vortex s’inscrivent dans un projet artistique commun : travailler à partir de « l’injongabilité complémentaire des éléments », en l’occurrence l’air. Deux spectacles qui partent du défi de jongler avec le vent, en s’appuyant sur un thème musical déclencheur commun : L’Après-midi d’un faune de Debussy. Ils s’inscrivent aussi dans un dispositif scénique similaire et débutent par la transformation d’un objet identique, un simple sac de plastique.

L’Après-midi d’un Foehn

L’Après-midi d’un Foehn est plutôt destiné à un jeune public. C’est un ballet chorégraphique pour marionnettes. Face au public, Phia Ménard découpe et assemble des sacs en plastique (avec ciseaux et scotch) qui deviendront des petits personnages multicolores. Ils s’animent et dansent grâce au souffle des ventilateurs. Ce spectacle ramène à l’enfance, quand nous fabriquions des choses avec nos mains et que nous leur donnions vie. C’est magique, simple et beau !

Phia Ménard, telle une magicienne sort les sacs de son manteau et semble les dompter. Son costume noir avec des dorures rappelle quelque peu les costumes traditionnels  de Monsieur Loyal.

Problématique de la transformation

Vortex

Vortex s’adresse plutôt à des adolescents et des adultes, et pose entre autres la question de l’identité. Ce spectacle fait partie de la série des Pièces du vent et a nécessité 3 ans de recherche sur les courants d’air !

Une créature, sans sexe ni âge, enlève petit à petit des couches de matière qu’elle a sur son corps. Une fois ôtées, elles se gonflent et bougent grâce aux ventilateurs qui entourent la scène. La créature passe par tous les stades de difformité. Nous assistons à une sorte de mue. Dans la question de l’identité, il y a question de la peau et de l’image. A quel moment on est sur d’être en face d’un être humain dans ce qu’il a de plus sincère ? A quel moment sommes nous vrais ?

“Vortex pose la question de combien de fois on change de peau pour essayer de trouver sa place dans la société.” P.M.

Cette création est un manifeste du genre, moment où l’artiste à 37 ans décide d’assumer la transition de son corps d’homme à celui d’une femme. La question du genre irrigue l’ensemble de ses spectacles.

Responsabilité politique de l’artiste

A la fin de chaque spectacle, Phia Ménard parle avec le public du spectacle, mais aussi de l’actualité politique. Une manière de concerner le public et de ramener dans les théâtres toutes les problématiques sociales et politiques.

Elle n’est pas de ces artistes qui refusent leur part de la responsabilité politique. Inquiète du repli sur soi du monde de la culture, elle œuvre à ce que les théâtres ouvrent davantage les yeux sur la société qui les entoure. Surtout dans ce qu’elle a de plus dérangeant. Phia Ménard aime semer le trouble.

” Ces zones de flou, que l’on ne veut pas dire ni nommer, les questions de la norme, de la sexualité, du plaisir, du genre… Là où la société ne veut pas aller, il faut que nous, les artistes, on y aille.”

Pour aller plus loin

Partager cet article

Poster un commentaire

2 thoughts on “Phia Ménard, la dompteuse des éléments”

  1. Amber dit :

    C’est vraiment une artiste accomplie. Je suis vraiment une grande fan de ses représentations. Rien à dire, on voit bien qu’elle sait ce qu’elle fait.

    1. Hélèna D. dit :

      Merci pour votre commentaire, nous aussi nous sommes fan de Phia Ménard !

Comments are closed.