Don Giovanni
Dan Fante
lu, vu, entendu par cgremeret - le 14/10/2015
Une pièce autobiographique grinçante. Toute la famille se retrouve pour célébrer les 70 ans du patriarche dans son ranch défraîchi de Malibu. Durant 24 heures, le père va tenter de contrôler avec violence et maladresse son petit univers qui se délite dans l'alcool mauvais.
Il y a là sa femme douce, constante, forte de sa solidité tranquille dans la tempête qui l’entoure et qui charrie des monceaux d’ordures sans sembler l’atteindre. Ressac d’injures et de rancœurs qui n’épargnent pas ses deux fils ivrognes, Bruno, l’acteur à belle gueule, un addict au repenti récent et artificiel et Richard, l’aîné brillant, homosexuel, pianiste promis à un brillant avenir, devenu au désespoir de son père prof de sport dans un lycée dont il se fait renvoyer suite à une liaison avec un ancien élève. Lui aussi picole sec.
Génération après génération, cette tendance à la boisson n’épargne personne ; Agnès, la femme sexy et vindicative de Bruno, applique la maxime In Vino veritas en se saoulant copieusement tout au long de la pièce sous les yeux de sa fille discrète et à peine ado.
Ici ça ne chante pas, ça gueule, ça boit, ça se déchire, ça grince, ça gicle comme lorsqu’on laisse enfin couler ce qui était bien trop canalisé. Les veines de l’hérédité tracée s’ouvrent, se déchirent et envoient du sang, des larmes et des mots, des rires et du bourbon, par jets plus impressionnants qu’ils ne sont mortels. Une blessure de théâtre, la plaie est béante, ouverte mais nettoyée et les chairs se recomposent, promettent un “je t’aime” final, une guérison nantie d’une cicatrice nécessaire à la construction de l’identité.
Sous le soleil californien, un enfer où un pitbull édenté et toujours sanguinaire fait office de pauvre cerbère. La rédemption y est possible, on est à deux doigts de Scotch du purgatoire.
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